C’est la division ( Entzweiung ) qui est à l’origine du besoin de philosophie…
Hegel, La Différence entre les systèmes philosophiques de Fichte et de Schelling
Tout ce qui se passe au ciel et sur terre se passe aussi dans l’éternité, la vie du Divin et tous les événements historiques, tout tend seulement à faire que l’esprit se connaisse, se rende objectif à lui-même, se trouve, c’est à dire devienne pour lui-même, fusionne avec lui-même. L’esprit est dédoublement et aliénation, mais (…) c’est à seule fin de pouvoir ad-venir à lui-même…
… Ce n’est que dans le penser que toute étrangèreté devient transparente, et a disparu ; l’esprit est ici émancipé, d’une manière absolue…
… C’est ainsi que l’esprit s’oppose en lui-même à lui-même…
Il a là pour tâche de se sur-monter lui-même, comme le véritable obstacle contradictoire à son soi-même ; le développement, qui dans la nature est une calme émergence, est dans l’esprit un combat d’une dureté infinie contre soi-même. La volonté de l’esprit est d’atteindre son propre concept; mais il se le dissimule, et il est fier et empli de jouissance dans cette aliénation de soi-même…
… Chaque seuil du développement de l’esprit du monde puisqu’il diffère des autres, a son principe propre et particulier. Un tel principe est, dans l’histoire, une déterminité de l’esprit, l’esprit particulier d’un peuple. C’est en elle que cet esprit exprime concrètement tous les aspects de sa conscience et de sa volonté, toute son effectivité. Elle est l’empreinte commune à sa religion, sa constitution politique, sa vie éthique, son système juridique, ses mœurs, mais aussi à sa science, son art et sa capacité technique. Ces propriétés plus spéciales sont à comprendre en partant de cette propriété universelle, le principe particulier d’un peuple. Réciproquement, c’est en partant des détails factuels présents dans l’histoire que l’aspect universel de cette particularité est dé-celable…
… La ruse de la raison consiste nommément à faire agir les passions pour elle-même…
L’universel est un moment de l’idée productive, un moment de la vérité tendant de tous ses forces vers elle-même. Les hommes historiques, les individus historico-mondiaux, sont ceux dont les fins abrite un tel universel…
Hegel, Leçons sur l’histoire de la philosophie
Tout cheminement de culture ( Bildung ) se réduit à la différence des catégories.
Toutes les révolutions, pas moins dans les sciences que dans l’histoire du monde, dérivent du fait que l’esprit, pour se comprendre et s’entendre, en vue de se posséder lui-même, a changé ses catégories, se saisissant alors d’une manière plus véridique, plus profonde, plus intime et plus en accord avec son soi…
Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques
La non-dépendance est ce qu’il y a de plus intime, et c’est à partir d’elle que surgit tout l’édifice du monde de l’esprit.
Hegel, Cours de philosophie du droit de 1831
Aimer le Divin, c’est se sentir, dans le Tout de la vie, sans limite et ainsi dans l’infini…
Hegel, L’Esprit du christianisme et son destin
La crise elle-même apparaît d’abord sur le terrain de la spéculation et s’empare seulement après de la production. Ce n’est donc pas la sur-production, mais la sur-spéculation, qui n’est en soi qu’un simple symptôme de la sur-production, qui apparaît, à une vue superficielle, comme la cause de la crise. L’interruption violente de la production qui suit, n’apparaît pas comme la nécessaire conséquence de son exubérance antérieure, mais purement comme la répercussion de l’effondrement spéculatif…
Marx-Engels, Neue Rheinische Zeitung, 1850
La loi de la baisse tendancielle du taux de profit est, à tous points de vue, la loi la plus importante de l’économie politique moderne et la plus essentielle à la compréhension des rapports les plus complexes. Du point de vue historique, c’est la loi la plus fondamentale. Et c’est une loi qui jusqu’ici, malgré sa simplicité, n’a jamais été comprise et encore moins consciemment exprimée.
Marx, Grundrisse
Mais si le Capital pose chacune de ses limites comme une entrave qu’il surmonte ainsi de manière idéelle, il ne la surmonte pas réellement pour autant; et comme chacune de ses limites est en contradiction avec sa détermination et sa destination, sa production se déploie dans des contradictions qui sont constamment surmontées mais tout aussi constamment re-posées. Et il y a plus…. L’universalité à laquelle le Capital aspire irrésistiblement se heurte à des obstacles qu’il rencontre de par sa nature propre et qui le font se reconnaître à lui-même – à une certaine phase de son développement – comme contradiction majeure à cette tendance à l’universalité, le poussant donc à sa propre invalidation.
La forme la plus abstraite de la crise c’est la métamorphose de la marchandise elle-même qui renferme, en tant que mouvement développé, la contradiction – impliquée dans le mouvement de la marchandise – entre valeur d’échange et valeur d’usage, puis entre argent et crise…
La production capitaliste ne produit nullement à un niveau arbitraire, mais, plus elle se développe, et plus elle est obligée de produire à une échelle qui n’a rien à voir avec la demande immédiate, mais dépend d’une extension croissante du marché mondial…
Marx,Théories sur la plus-value
L’idéologie est un processus que le soi-disant penseur accomplit sans doute avec conscience, mais avec une conscience fausse. Les forces motrices véritables qui le mettent en mouvement lui restent inconnues, sinon ce ne serait point un processus idéologique. Aussi s’imagine-t-il des forces motrices fausses ou apparentes. Du fait que c’est un processus intellectuel, il en déduit et le contenu et la forme de la pensée pure, que ce soit de sa propre pensée ou de celle de ses prédécesseurs. Il a exclusivement affaire aux matériaux intellectuels ; sans y regarder de plus près, il considère que ces matériaux proviennent de la pensée et ne s’occupe pas de rechercher s’ils ont quelque autre origine plus lointaine et indépendante de la pensée. Cette façon de procéder est pour lui l’évidence même, car tout acte humain se réalisant par l’intermédiaire de la pensée lui apparaît en dernière instance fondé également sur la pensée.
L’idéologue historien (historien doit être ici un simple vocable collectif pour : politicien, juriste, philosophe, théologien, bref, pour tous les domaines appartenant à la société et non pas seulement à la nature), l’idéologue historien a donc dans chaque domaine scientifique une matière qui s’est formée de façon indépendante dans la pensée de générations antérieures et qui a évolué de façon indépendante dans le cerveau de ces générations successives. Des faits extérieurs, il est vrai, appartenant à ce domaine ou à d’autres peuvent bien avoir contribué à déterminer ce développement, mais la pré-supposition tacite est que ces faits sont, à leur tour, de simples fruits d’un processus intellectuel, de sorte que nous continuons toujours à rester dans le royaume de la pensée pure qui a heureusement digéré même les faits les plus têtus.
Engels, Lettre à F. Mehring du 14 juillet 1893