… pour s’emparer de l’essence absolue… le contre-sens est de faire usage d’un moyen quelconque.

 

… c’est le rayon lui-même par lequel la vérité nous touche, qui est la connaissance…

 

En se poussant vers son existence vraie, la conscience atteindra un point où elle se libérera de l’apparence, l’apparence d’être entachée de quelque chose d’étranger qui est seulement pour elle et comme un autre ; elle atteindra ainsi le point où le phénomène devient égal à l’essence, où, en conséquence, la présentation de l’expérience coïncide avec la science authentique de l’esprit ; finalement, quand la conscience saisira cette essence qui lui est propre, elle désignera la nature du savoir absolu lui-même.

 

Hegel, Phénoménologie de l’Esprit

Quelque-chose est donc vivant seulement dans la mesure où il contient dans soi la contradiction et à vrai dire est cette force [qui consiste] à saisir dans soi et à accueillir la contradiction.

 

Hegel, Science de la logique

Appréhender et connaître comme il faut le dialectique est de la plus haute importance. Il est en général le principe de tout mouvement, de toute vie et de toute manifestation active dans l’effectivité.

 

Hegel, Encyclopédie

La communauté de l’homme avec l’homme est le principe et le critère premiers de la vérité et de l’universalité. L’homme pour soi ne possède en lui l’essence de l’homme ni au titre d’être moral, ni au titre d’être pensant. L’essence de l’homme n’est contenue que dans la communauté, dans l’unité de l’homme avec l’homme, unité qui ne repose que sur la réalité de la distinction du moi et du toi.

 

Feuerbach, Principes de la Philosophie de l’avenir

La nature n’est ni objectivement, ni subjectivement présente de façon immédiatement adéquate à l’être humain. Et de même que tout ce qui est naturel doit être engendré, de même l’homme possède son acte d’engendrement, l’histoire, qui cependant, pour lui, est un acte d’engendrement conscient.

 

… La grandeur de la Phénoménologie hégélienne et de son résultat final – de la dialectique, de la négativité en tant que principe qui meut et engendre – est donc que Hegel conçoit l’auto-engendrement de l’homme comme un procès, l’objectivation comme dés-objectivation, comme extériorisation et comme suppression de cette extériorisation ; c’est le fait qu’il saisisse l’essence du travail et qu’il comprenne l’homme objectif, l’homme vrai parce que réel comme le résultat de son propre travail.

 

… On voit comment, supplantant la richesse et la misère de l’économie politique, surgit l’homme riche pourvu de riches exigences humaines. L’homme riche est en même temps l’homme qui pour vivre, a besoin d’une totalité de manifestations humaines.

 

… La dépréciation du monde des hommes augmente en raison directe de la mise en valeur du monde des choses.

 

Marx, Manuscrits de 1844

Si l’appropriation privative s’achemine, d’elle-même vers sa propre dissolution, c’est uniquement en engendrant le prolétariat en tant que prolétariat, la misère consciente de cette misère morale et physique, l’humanité consciente de cette inhumanité qui, du fait de cette conscience, s’abolit en se dépassant.

 

… Dans le prolétariat pleinement développé se trouve pratiquement achevée l’abstraction de toute humanité, même de l’apparence d’humanité ; dans les conditions de vie du prolétaire se trouvent condensées toutes les conditions de vie de la société actuelle dans ce qu’elles peuvent avoir de plus in-humain… L’émancipation du prolétariat doit par conséquent réaliser une émancipation complète : il ne peut s’émanciper lui-même sans abolir ses propres conditions de vie. Il ne peut abolir ses propres conditions de vie sans abolir toutes les conditions de vie inhumaine de la société actuelle, que résume sa propre situation.

 

Marx, La Sainte Famille

Stirner croit (…) que les prolétaires communistes qui révolutionnent la société et établissent les rapports de production et la forme des relations sur une base nouvelle, c’est-à-dire eux-mêmes, en tant qu’hommes nouveaux, sur leur nouveau mode de vie, restent “ceux qu’ils étaient dans le passé “. La propagande inlassable que font les prolétaires, les discussions qu’ils organisent entre eux quotidiennement, prouvent à suffisance combien peu eux-mêmes veulent rester “ceux qu’ils étaient”, et combien, d’une manière générale, ils souhaitent que les hommes ne restent pas ceux qu’ils étaient. Ils ne resteraient ceux qu’ils étaient que si avec saint Sancho ils cherchaient la faute en eux-mêmes ; mais ils savent trop bien que c’est seulement quand les conditions seront modifiées qu’ils cesseront d’être “ceux qu’ils étaient” et c’est pourquoi ils sont décidés à modifier ces conditions à la première occasion. Dans l’activité révolutionnaire, se changer soi-même et changer ces conditions coïncident.

 

Marx-Engels, L’idéologie allemande

Si donc le mode de production capitaliste est un moyen historique de développer la matérialité de la force productive et de créer le marché mondial qui lui correspond, il est également la contradiction permanente entre cette tâche historique et les rapports de production sociaux qui lui correspondent.

 

… Les limites de la valorisation entrent ainsi constamment en contradiction avec les méthodes de production que le Capital doit employer pour sa fin, et qui tendent à un accroissement interminable de la production, à la production comme fin en soi, à un développement inconditionné des forces productives sociales du travail.

 

… La science qui astreint les membres sans vie de la machine, en vertu de leur construction, à agir de la manière voulue, en tant qu’automate [durch ihre Konstruktion zweckgemäss als Automat zu wirken], n’existe pas dans la conscience de l’ouvrier, mais agit sur lui à travers la machine comme une force étrangère [fremde Macht], à l’égal d’une force de la machine elle-même.

 

Marx, Manuscrits de 1857-1858

La violence (c’est-à-dire le pouvoir d’État) est, elle aussi, une puissance économique…

 

Engels,Lettre à Conrad Schmidt – 27 octobre 1890

Sous le grondement de l’effondrement économique qui s’approche, l’armée encore sommeillante des prolétaires se réveillera comme au son des trompettes du Jugement dernier, et les corps des combattants assassinés ressusciteront et exigeront des comptes de leurs bourreaux. Aujourd’hui encore le grondement souterrain du volcan ; demain il fera éruption et ensevelira les bourreaux sous ses cendres brûlantes et ses flots de lave incandescente.

 

Karl Liebknecht, Malgré tout ! – 15 janvier 1919

… Celui qui s’accapare le capital produit par le travail vivant (la plus-value) ne se présente ni comme personne humaine, ni comme classe humaine ; il est le Monstre, le Travail objectivé, le capital fixe, le monopole et la forteresse de la Forme du Capital en soi, la Bête sans âme et même sans vie, mais qui dévore et anéantit le travail vivant, le travail des vivants et les vivants eux-mêmes…

 

Le capital fixe sous la forme de machines – ce que l’on appelle le complexe des biens instrumentaux et dont, à l’Est autant qu’à l’Ouest, on chante les louanges comme s’il s’agissait de la voie royale vers le développement des forces productives – est le nouveau monstre qui étouffe l’humanité contemporaine. Les louanges qu’il reçoit à l’Est comme à l’Ouest attestent de la domination à laquelle le mode de production capitaliste est dorénavant parvenu.

 

… La bête, c’est bien l’entreprise, non le fait qu’elle ait un patron…

 

Bordiga, Sur l’économie et le Sur le communisme révolutionnaire – il programma comunista –

Le prolétariat n’existe pas à l’état d’entité observable et descriptible comme la majorité des faits sociaux. Le prolétariat est un rapport avec le Capital. C’est le rapport le plus important au sein même du Capital, le plus important rapport interne au Capital. Le prolétariat est un rapport du Capital avec lui-même. Il existe donc nécessairement un lien entre la constitution du prolétariat en classe, c’est-à-dire en catégorie qui s’oppose à la société avec ses objectifs propres, et son existence au sein du Capital.

 

Pierre Guillaume, Perspective sur les conseils…

La première intention de la domination spectaculaire était de faire disparaître la connaissance historique en général ; et d’abord presque toutes les informations et tous les commentaires raisonnables sur le plus récent passé. Une si flagrante évidence n’a pas besoin d’être expliquée. Le spectacle organise avec maîtrise l’ignorance de ce qui advient et, tout de suite après, l’oubli de ce qui a pu quand même en être connu. Le plus important est le plus caché.

 

… Jamais censure n’a été plus parfaite. Jamais l’opinion de ceux à qui l’on fait croire encore, dans quelques pays, qu’ils sont restés des citoyens libres, n’a été moins autorisée à se faire connaître, chaque fois qu’il s’agit d’un choix qui affectera leur vie réelle. Jamais il n’a été permis de leur mentir avec une si parfaite absence de conséquence. Le spectateur est seulement censé ignorer tout, ne mériter rien. Qui regarde toujours, pour savoir la suite, n’agira jamais : et tel doit bien être le spectateur.

 

Guy Debord, Commentaires sur la société du spectacle

En 1881, dans ses Notes critiques sur Wagner, l’un de ses derniers textes, Marx précise que « la valeur d’usage remplit (chez lui) une fonction bien autrement importante que dans l’économie traditionnelle ». Ce n’est pas là un hasard… Comme les Grundrisse le soulignent avec force ; la valeur en tant que mouvement d’elle-même est toujours une conséquence et jamais une cause. Dit autrement, il convient de remarquer que si l’échange totalitaire a bien conquis la totalité de la production depuis que la domination réelle de la valeur s’est faite équivalence générale fétichiste à l’ensemble des usages de la société, cela bien loin de renvoyer la valeur d’usage au rang de simple support marginal de la valorisation, lui a attribué une importance décisive. Ce que la gigantesque crise contemporaine du taux de profit nous remémore avec brio par l’entremise de la valeur d’usage qui vient là rappeler à l’ordre toutes les pulsions hystériques de la valeur d’échange qui précisément croyait pouvoir s’échapper hors du réel dans un monde automatique non-historique où justement l’histoire du négatif serait abolie… En vérité, avec la crise, la valeur d’usage remet à sa place la valeur d’échange en nous informant que l’histoire du Capital n’est pas un film de science-fiction prestidigitationniste qui se conclurait par cette sanctification indélébile du spectacle marchand qui est devenue le totem et le tabou à la fois des clowns économistes de l’université officielle de l’argent et des derniers épiciers séniles de la décomposition gauchiste dépressive… Avec le déroulement du temps présent, la valeur d’usage a pris là un rôle absolument central et qualitativement différent depuis l’entrée en domination réelle supérieure puisqu’elle se montre désormais et partout comme le lieu essentiel qui, en dernière instance prouve que le monde de la marchandise ne peut absolument plus surmonter la contradiction fondamentale de la marchandisation du monde car l’échange de la valeur d’usage tend sans conteste à faire exploser l’usage de la valeur d’échange. Le Capital a beaucoup déliré ces dernières années sur sa capacité à s’échapper de lui-même mais derrière la crise du taux de profit et la saturation des marchés, ce qui travaille si mal caché par le mauvais spectacle de la tyrannie sanitaire de la mise en friches mondiale, c’est la crise de l’équivalent général abstrait en tant que tel qui nous déclare avec force que l’autonomisation de la valeur d’échange ne peut plus fondamentalement s’autonomiser de l’échangisme de la valeur…

 

DU SPECTACLE FETICHISTE DE LA MARCHANDISE MONDIALE ET DE SA CRISE FINALE…