Intervention des Francs-Maçons.
Un grand nombre de Loges maçonniques se sont enfin décidées
à faire acte public d’adhésion à la Commune.1
Trois semaines plus tôt, cette démarche eût pu être d’une
réelle importance pour la Révolution.2
La Maçonnerie, grâce à l’idée que s’en font les naïfs, jouit
en province d’une incontestable influence politique, surtout
au moment des élections.
Son adhésion eût alors pesé d’un grand poids sur la détermination
des députés républicains des départements, qui ne
peuvent rien auprès de leurs électeurs sans son concours.
Mais il est trop tard maintenant pour en espérer le moindre
résultat.
Thiers a eu tout le temps nécessaire pour endormir les premières
méfiances des républicains et aussi pour leur faire voir
la Commune sous le faux jour d’une simple émeute dirigée
précisément contre la sécurité de la République.
Nous en avons eu la preuve dans l’attitude presque hostile
que nous ont témoignée les délégués de Lyon envoyés
exprès à Versailles et à Paris pour se rendre compte de la
situation. Ces délégués ne nous ont-ils pas dit sans rire qu’ils
étaient convaincus que Thiers était républicain et ne toucherait
en rien aux franchises municipales dont jouit Lyon en ce
moment…, grâce à l’obligation où il se trouve, de concentrer
toutes ses forces contre Paris.
Pauvres gens ! sont-ce des niais ou des roublards, ces délégués
lyonnais ?
Donc cette décision tardive des loges parisiennes – de même
que celle des délégués des départements qui s’y sont joints –
resteront sans effet, c’est à craindre.
Gustave Lefrançais, Souvenirs d’un révolutionnaire, De juin 1848 à la Commune
1 Si un certain nombre de loges parisiennes se rallièrent à la Commune pendant que d’autres tentèrent hypocritement de concilier les deux parties, les obédiences, elles, en tant qu’instances maçonniques dirigeantes, condamnèrent l’insurrection et dénoncèrent la participation de leurs “Frères”.
2 Outre l’essence contre-révolutionnaire de la franc-maçonnerie en tant qu’avant-garde idéologique du Capital, nous savons que la réussite de la Révolution ne découle pas mécaniquement de telle ou telle adhésion volontariste, mais qu’elle est le résultat dialectique nécessaire d’un long processus historique qui voit finalement, et dans une même dynamique, le mode de production capitaliste s’auto-invalider et la conscience révolutionnaire s’universaliser, lorsque la logique de valorisation ne peut plus valoriser sa propre logique (voir en ligne le texte OUI, LE CAPITAL VA NÉCESSAIREMENT MOURIR…).